Corsair II
Le « laid petit branleur trapu »…
Présentation : Laurent
Schmitz
Après le F-100F
et le Su-9, ma fascination
pour les "jets" de bonne taille est loin d’être
calmée. En plus, je suis tombé sur une photo de deux A-7
Corsair II de la "Navy" américaine. Mon dieu que cet
avion est moche ! On ne l’appelait pas pour rien le "SLUF",
Short Little Ugly Fucker. En français ça pourrait se traduire
par : "laid petit branleur trapu". Tout à fait l’avion
que je veux ! 
Comme modèle réduit radiocommandé, le A7 est intéressant.
Le fuselage simple, la surface alaire généreuse et l’aile
haute qui n’interfère pas avec l’entrée d’air
sont autant de points forts. L’entrée d’air béante
qui lui donne cet air inimitable est en revanche un peu délicate
à fabriquer. Quelques rapides calculs ont permis de déterminer
la taille maximale pour voler avec une bonne turbine de 90 mm et
un accu 6S. L’envergure s’établit à 130 cm
pour 154 cm de long et 3,5 kg au décollage avec quelques accessoires.
La charge alaire reste raisonnable, autour de 90 g/dm². Comme
à mon habitude, je n’ai pas prévu de train rentrant
: le modèle décolle à la catapulte et se pose sur
le ventre. Avec un train rentrant en plus, cet avion ne volerait tout
simplement pas aussi bien, serait beaucoup plus fragile et bien plus
cher…
Caractéristiques |
Envergure : 130 cm
Longueur : 154 cm
Surface alaire : 37,6 dm²
Masse sans accu / au décollage : 2.800 g / 3.465 g
Accu : Li-Po 4.500 mAh 6S
Contrôleur : 190A 6S
Turbine : Dr MadThrust 90mm à douze pales
Brushless : outrunner 1600 kV
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A-7 Corsair
II : le camion à bombes du Vietnam |
Tout le monde confond
cet avion avec son grand frère, le F-8 "Crusader".
Ce dernier était un chasseur supersonique. Il était
élancé, avait un nez pointu et la post-combustion. |
Le
A-7, avec un "A" pour "attaque", c’est
tout le contraire : court, nez arrondi et pas de post-combustion.
Là où le F-8 emportait juste deux missiles pour
intercepter vite fait les bombardiers russes et revenir se poser
à court de jus, le A-7 était un camion à
bombes qui pouvait passer son après-midi à croiser
au-dessus du champ de bataille. Le A-7 possédait en outre
un système de navigation à inertie qui permettait
à son pilote de savoir à tout moment où il
se trouvait, grâce à une carte projetée sur
un écran. Cet ancêtre du GPS, couplé à
un ordinateur de tir ultraprécis faisait du Corsair II
un redoutable bombardier.

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L’avion
était en outre très solide et facile à entretenir.
Son réacteur à double flux consommait peu mais en
contrepartie l’A-7 ne pouvait pas passer le mur du son. Cela
dit, avec jusqu’à 32 bombes de 250 kg sous les
ailes, le Corsair n'avait pas besoin d’aller très vite
pour forcer le respect des soldats ennemis... |
Le plan trois vues trouvé sur Internet est légèrement
adapté pour rendre le modèle plus docile : les ailes sont
agrandies au bord d’attaque tandis que l’empennage prend
quelques centimètres au bord de fuite pour augmenter le bras
de levier. Pour le reste, le modèle est "maquette".
La construction est assez rapide et consiste à assembler des
tronçons de mousse PU découpés au fil chaud. Le
modèle est donc un "foamie" géant… C’est
déjà la méthode utilisée avec succès
pour mon Su-9 mais cette fois, j’ai décidé de fibrer
le fuselage pour éviter de marquer la mousse lors des manipulations.
La partie la plus complexe à découper est l’avant
du fuselage, qui n’est pas évolutif. Le bloc de mousse
est d’abord posé en "vue de côté"
de façon à découper la forme de la verrière.
Notez que celle-ci monte légèrement avant de s’incurver.
Ensuite, je découpe longitudinalement selon les gabarits A et
C mais sans suivre la partie haute du cercle formant le radôme.
Pour cette partie, je guide le fil à l’aide de la dépouille
interne du gabarit C, de façon à découper un "U’
inversé. Quand la moitié gauche est faite, je retourne
les gabarits pour découper
l’autre côté à l’identique. Après
avoir enlevé les dépouilles, le gabarit A est maintenu
dans la mousse et la partie haute du radôme est taillée
pour suivre l’arrondi. Ce travail de sculpture est moins complexe
qu’il n’y paraît et on se retrouve vite avec quelque-chose
qui ressemble à l’avant d’un A-7. Il reste à
découper l’intérieur de la prise d’air et
à poncer la lèvre en arrondi. L’étape suivante
consiste à séparer la verrière et à se servir
du bloc de mousse obtenu pour mouler une feuille de PETG "Vivak"
à chaud. Le radôme subit un sort similaire.
On continue avec l’arrière du fuselage, dont les formes
sont presque développables. La turbine prend place dans le tronçon
G-H, après avoir découpé la moitié inférieure
de la veine d’air. Sur mon avion, la fibre recouvre le capot.
Pour accéder à la turbine en cas de panne, il faut un
coup de Dremel. Il est donc préférable de tout bien tester
avant de couvrir la mousse de fibre de verre…
Les ailes et empennages sont en mousse de polystyrène blanche
coffrée au balsa. Voyez la technique expliquée dans l’article
sur le Su-9. L’aile
possède ici une clé en carbone de 14x750 mm qui coulisse
dans des fourreaux de 16x14x330 mm. L’accu 6S de 4.500 mAh
prend place tout à l’avant, jusque dans le radôme.
La turbine est une "Dr MadThrust" de 90 mm trouvée
chez Hobbyking. Son corps est en métal et elle développe
2 kW en pointe. Deux ouvertures dans les flancs assurent le ravitaillement
en air frais. Le contrôleur 190 A prend place juste devant
la turbine. Son radiateur dépasse légèrement dans
la veine d’air. Il est muni de deux gros condensateurs de protection
additionnels car la rallonge doit arriver jusqu’à l’accu
dans le nez. Ce câble est au standard "8AWG". C’est
lourd mais c’est le seul moyen d’éviter les pertes
de courant.
Le fuselage est entièrement recouvert de fibre de verre 80 g/m²
enduite d’époxy fluide. La partie au-dessus des ailes est
en outre renforcée d’une couche de 180 g/m².
Le cockpit est fait de Dépron et accueille un pilote du commerce
réaliste mais un peu trop grand pour l’échelle.
La fibre protège efficacement la mousse, surtout au niveau de
l’entrée d’air, très exposée. Les ailes
s’emboîtent dans une ouverture pratiquée de part
et d’autre du fuselage. Quatre vis en plastique transparent servent
de verrou pour éviter qu’elles s’écartent.
Les deux vis arrière sont couvertes avec un marqueur à
alcool rouge de façon à ressembler à des feux de
position. Les vis s’enfoncent simplement dans un trou, leur filet
accroche la matière et évite qu’elles se détachent.
L’avion est entièrement couvert de film rétractable
de chez Hobbyking en blanc et gris clair. La pose est fastidieuse sur
la fibre car le film doit adhérer partout, ce qui n’est
pas évident. Il faut travailler par petites surfaces et à
température modérée. Les marques et cocardes sont
dessinées sur PC et sorties à l’imprimante laser
couleur sur du vinyle autocollant.
Un A-7 en configuration lisse, c’est du jamais vu ! Quelques charges
externes sont donc imprimées
en 3D à l’aide de filament de type PolyLight de chez
3DLabPrint. Ces accessoires sont amovibles. L’armement est maintenu
par des tiges en bambou (récupérées de brochettes)
et un aimant au néodyme qui se colle sur un morceau de lame de
cutter usagée. Le cockpit et certains détails sont peints
à l’acrylique dela série "XF" de Tamiya.
Des autocollants simulent le tableau de bord et les consoles latérales.
La verrière tient par quatre petites vis. Pas très pratique
mais sûr à 100%. La tranchée creusée dans
la mousse sous le cockpit est assez spacieuse pour l’accu 6S.
Celui-ci repose sur une languette de velcro. Une tige de brochette traversant
le fuselage de part en part évite qu’il recule.
Enfin, le morceau de carbone noyé sous le fuselage devant le
bord d’attaque ressemble à une antenne mais sert en fait
au lancement à la catapulte. Pour le centrage, j’ai procédé
aux calculs savants de la méthode de Frank Aguerre, exposée
dans le magazine
de ma fédération. Force est de constater que ça
marche, même si ça prend "un certain temps" pour
bien comprendre le texte et procéder à toutes les mesures.
Premier décollage, à la catapulte comme il se doit pour
un avion embarqué… L’avion part selon une pente idéale
d’une vingtaine de degrés mais il tire sur la droite. Manche
d’ailerons à fond à gauche et il entame un virage
bien trop ample en prenant de l’altitude. Quand il revient enfin
vers le terrain, je constate que pour le maintenir à plat le
manche est à plus de la moitié à gauche. J’ai
déjà eu des avions "tordus", mais pas à
ce point ! Entre-temps, le trim est à fond aux ailerons et à
la dérive, mais le problème persiste : un aileron doit
être bloqué en partie braqué. Je tente un virage
à droite, l’avion passe instantanément sur le dos.
Pas le choix, je termine le tonneau et remets l’avion à
plat, manche d’ailerons à fond à gauche. Je suis
dépité : qu’est-ce qui peut bien causer ça
? En virant tant bien que mal uniquement à gauche, je ramène
péniblement l’avion dans l’axe de piste et parviens
à le poser en douceur. Le voilà sur une des tables de
montage, à hauteur des yeux. Les ailes ne semblent pas vrillées
et les ailerons fonctionnent ?!? Si ça ne vient pas des ailes,
est-ce que… Oui ! Les deux volets de profondeur n'ont pas exactement
la même incidence. La différence est faible, mais ça
suffit pour qu’ils agissent en "tailerons". Décaler
simplement le palonnier de servo d’un cran donnerait trop de correction,
je dois intervenir via la radio. Comme chaque volet a son servo, c’est
vite programmé en ajoutant 30% de "subtrim’. Je recharge
l’accu et c’est reparti pour un tour.
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Cette fois, le Corsair est parfaitement docile. C’est un tout
autre avion que j’ai au bout des manches : il vole sur des rails
! La puissance semble d’abord un peu "juste" car cette
turbine fait très peu de bruit. Mais ce n’est qu’une
impression car l’avion monte sans effort malgré sa masse
importante, preuve qu’il est correctement motorisé. Effectivement,
il tient le palier avec un filet de watts, on l’entend encore
à peine. Tonneaux à gauche et à droite, virages
amples, passages à raz de la piste… C’est un régal
de précision ! Il faut juste anticiper à cause de sa masse,
mais ça contribue aussi au plaisir du pilotage.
Le A-7 a une énorme présence en vol. On a l’impression
de voir et piloter un avion bien plus gros. Après quatre minutes
de bonheur, j’entame l’atterrissage sans appréhension.
L’appareil allonge bien et touche nez haut à vitesse réduite.
Le testeur annonce 15% dans l’accu après presque cinq minutes
de vol mais à la recharge je remets seulement 3.000 mAh. Il restait
donc une réserve confortable.
Quelques jours plus tard, le temps est au beau fixe. Un copain a pris
les commandes du Nikon pour une séance de photos. En plus des
deux "Sidewinder’ d’autodéfense, je décide
de charger les six pylônes de tout un arsenal : un missile antiradars
"Shrike", un "Maverick", un "Bullpup",
une bombe "Rockeye" et pas moins de six Mk82 "Snakeye"
pour faire bonne mesure. Je vous ai déjà dit que c’est
un "camion à bombes" ? En fait, c’était
mon objectif depuis le début : faire voler le Corsair avec tout
son chargement. Alors : décollera, décollera pas ? L’avion
part bien droit comme si de rien n’était. Il semble même
encore plus stable. D’une part les charges avancent un peu le
CG et d’autre part toutes ces ailettes contribuent à stabiliser
la trajectoire. Je n’ai même pas l’impression qu’il
peine à grimper. Derrière moi j’entends les rafales
du Nikon en mode automatique alors que j’enchaîne les passages
à l’anglaise avec un grand sourire : Mission Accomplie
!
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Prix des matériaux et équipements |
Mousse PU, PS et balsa : 50 €
Turbine : 120 €
Accu : 70 €
5 servos MG : 35 €
Tubes de carbone, fibre de verre, colleet finition : 30 €
Câblage, condensateurs, UBEC : 35 €
Pilote, charges externes et vinyle autocollant : 50 €
Total : 390 €
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Contact
: laurent.schmitz@jivaro-models.org