J’ai toujours aimé voler lentement.
Par Jean-Baptiste Gallez
Bien sûr, dans ma déjà
longue carrière de modéliste du dimanche, j’ai tâté
des autres « spécialités » des petits
avions : j’ai essayé l’hélicoptère,
j’ai essayé le canard, j’ai essayé l’autogyre,
j’ai essayé le très petit, j’ai essayé
la mousse, j’ai essayé l’électrique, j’ai
essayé les deltas qui foncent…
J’en reviens toujours à cette conclusion : je préfère
voler lentement, près du sol et près de moi.
Il y a … un certain temps, je débutais dans le vol radio-commandé
au CLM, à Mellery. La grande mode à cette époque
était le « Buccaneer », un avion de vol
libre de 1936, adapté pour la radio. Déjà en 1,70
m d’envergure il avait un vol très lent et majestueux.
Equipés alors des premiers moteurs 4 temps (avec les culbuteurs
apparents, souvenez-vous), c’était à celui qui volerait
le plus lentement, voire même en marche arrière avec un
peu de vent.
Moi je n’en étais alors qu’aux
« Holiday », « PT 40 »,
avions de début classiques puis, un peu plus osé, un « Basic
2000 » de chez Scorpio.
En construction bois traditionnelle, bien sûr, mais à partir
de kit où les pièces principales étaient pré-découpées.
Me lancer dans une construction à partir d’un seul plan
me paraissait alors impossible.
Un membre de ce club avait fait un très beau travail de remise
au propre de cet ancien plan et en proposait des copies au prix coûtant.
Impressionné par les qualités de vol de cet avion, j’en
ai acheté quand même une copie « peut-être
pour plus tard ».
Il y a … moins longtemps, je retrouve ce plan et je me lance dans
la construction qui m’effrayait déjà moins. Je l’ai
fait « classique », en respectant scrupuleusement
le plan et équipé de ce que j’avais alors sous la
main comme moteur, un simple .46 2 temps. Pour une impression de légèreté
accentuée, il était entoilé entièrement
en Oracover transparent.
C’était déjà fabuleux. Remonter
toute la piste à 5 cm du sol avec le moteur presque au ralenti
par une fin de journée calme d’été est un
des petits bonheurs de l’existence.
Il est certain que cet avion très léger et aux grandes
surfaces n’aime pas beaucoup le vent et il m’arrivait souvent
de l’emporter avec moi et de ne pas m’en servir. Mais les
quelques fins de journées de vol dans le soleil couchant valaient
toutes les petites contraintes.
Moteur presque toujours au ralenti, la consommation est ridicule, pourtant
il m’est arrivé plusieurs fois de me poser à court
de carburant après plus d’une demi-heure de vol, tant je
n’avais pas vu le temps passer.
Après quelques années de ce ravissement, je me suis dit
: Si je multiplie la taille et les capacités de cet avion …
je vais aussi multiplier mon bonheur …
Décision est donc prise de le reconstruire, en plus grand et
en faisant toutes les modifications utiles pour tendre vers un seul
but : voler le plus lentement possible.
Que faut-il pour cela :
La plus faible charge alaire, il faut donc faire le plus léger
possible et avoir un maximum de surface.
La corde (constante) est de 60 cm et l’envergure est de 3,50 m,
soit 2,1 m², avec le stab de 0,6 m², cela nous fait 2,7 m²
de surface portante.
Pour un poids de 7 kg, cela nous fait une charge alaire ridicule de
26 g/dm² (en moyenne dans cette taille on constate 50 - 100 g/dm²).
Pour faire léger, j’ai remplacé les longerons des
ailes classiques par deux tubes en carbone de 2,5 cm de diamètre,
mais très fins et donc légers, de plus ils constituent
« naturellement » les fourreaux pour les clefs
d’ailes, en carbone aussi. Pour le reste rien que du classique,
balsa et contreplaqué de bouleau, structure ajourée au
maximum.
Seul le triangle « assises d’ailes - train - moteur »
est un peu plus résistant.
Toutes les pièces courbes sont en lamelé-collé
de balsa, solidité et légèreté encore !
La section du fuselage ovoïde dans le modèle original a
été faite plate sur le dessous, cela ne se voit presque
pas.
Dernier détail, les moteurs de l’époque étaient
lourds, le nez était donc court, sur la première version
fidèle au plan initial j’avais dû rajouter du poids
dans le nez. Horreur ! Un rapide petit calcul et le nez est rallongé
en fonction du poids du moteur, un brave vieil OS Gemini bi-cylindre
20 cc, plus très puissant, mais encore assez fiable.
Notez que pour cet avion, je me suis dit : Pourquoi ne pas le faire
en électrique ?
Après un tour de nos principaux magasins, le verdict était
le même partout : un bon moteur brushless, un bon variateur, deux
bons accus Li-Po et un chargeur adapté … le tout entre
700 et 800 € … Gloups !
Et encore, pour ce prix, une fois mes deux accus épuisés,
je peux juste remballer et rentrer à la maison !
Pour voler lentement, il faut aussi un profil adapté.
Que fait un avion (grandeur ou réduit) quand il veut ralentir
? Il sort des volets qui augmentent la surface et « creusent »
l’intrados.
Il suffit donc de faire un profil qui présente naturellement
ces caractéristiques, comme vous pouvez le constater sur le dessin.
Evidemment
avec un profil pareil, inutile d’essayer d’aller plus vite,
la traînée est trop importante, en mettant plus de moteur
vous arrivez juste à monter.
Un peu de Solartex (10 m !), un peu de vernis, quatre servos : deux
pour la profondeur, un pour la dérive et un pour les gaz. Toutes
les commandes sont à câble « pull-pull ».
Le train est très grand, très en avant et très
souple. Dernier détail : il n’y a pas d’aileron,
cela vole très bien en deux axes.
Le résultat est comme je l’espérais : du pur bonheur
!
Sans le moindre vent, il suffit de « trottiner »
sur la piste pour rester à sa hauteur, cela doit faire +/- 10
km/h.
On se fait plaisir sans limite en faisant des circuits à 3 cm
de la piste et le retour à 10 cm du champ d’à côté,
des touch and go sur une roue puis sur l’autre (ou toute la piste
sur une seule roue !) et en décrochant au ras du sol, on arrive
à se poser sur moins de 2 m.
Il faut juste regarder attentivement la météo avant de
choisir l’avion que l’on emporte. Avec cette taille, pas
question de prendre un autre avion dans la voiture pour le cas où
il y aurait trop de vent.
Caractéristiques
:
Envergure : 3,50 m
Longueur : 2,40 m
Hauteur : 0,90 m
Poids : 7 kg
Moteur OS Gemini bi-cylindre 20 cc |
Contact : jean-baptiste@jivaro-models.org