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L’électrique, c’est facile
Formules magiques pour modélistes branchés...
Il y a les oubliés du lycée : les ohms, les ampères, les volts et les watts. Mais aussi les hélices, les lipos et les contrôleurs. Sans oublier le mystérieux "KV" et le célèbre "C", aux vertus tant vantées... Mais que signifient ces machins cabalistiques ? Et comment faire pour dompter nos précieux électrons ?
Jivaro-models.org vous livre
quelques formules magiques...
Texte et photos : Laurent Schmitz
Si quelques
irréductibles croient toujours que le thermique est plus léger,
plus puissant et moins cher, bien des modélistes ont franchi le
pas et n’ont plus besoin d’être convaincus. Oui mais voilà,
entre assembler un EasyStar avec "tout-dans-la-boîte"
et trouver la bonne combinaison d’équipements pour un Mustang perso
de 4 kg, il y a un pas. En thermique, c’est facile : une 13"x6"
sur un bon 10 cc et l’affaire est faite ! Mais en électrique, c’est
moins évident. Quoi que... Les gourous de l'ampèremètre
maîtrisent l'Art de la formule empirique, basée sur des kilomètres
de bobinages grillés et la dérivée seconde de l'intuition
universelle. Cette face cachée de la physique quantique exprime
la masse en poids, la consommation en ampères et la chaleur en
"secondes de doigts sur la cage tournante"... mais qu'importe
l'imprécision puisque ces formules sont destinées à
une utilisation strictement pratique. Et tant pis pour la Science !
Achetez vos watts au kilo !
La première formule magique permet de savoir combien de watts sont nécessaires pour faire voler correctement votre avion. Bien sûr, cette formule ne marche que si le matériel utilisé est raisonnablement adapté au modèle. Il est clair qu'un moteur de 300 grammes, même s'il est très puissant, n'a aucune chance de faire voler un EasyStar...
- Motoplaneur,
foamie léger, Piper Cub : 100 watts par kilo
- Trainer
: 150 watts par kilo
- Warbird, voltigeur de "sport" : 200 watts par kilo
- Racer,
3D : 300 watts par kilo
- Jet
à turbine : 400 watts par kilo
Exemple: un Hurricane de 3 kg et 150 cm volera bien avec une propulsion de 600 watts. Un Calmato de 2,5 kg se contentera de 375 watts, etc.
Bien entendu, ce n'est qu'une indication, mais elle permet déjà de "dégrossir" le sujet.
Un watt, ça tire énormément !
La seconde formule vous donne la traction statique (ou la poussée) que vous pouvez espérer d'un ensemble de propulsion performant. De nouveau, c'est une valeur repère destinée à dissiper pas mal de malentendus... ou de faux espoirs!
- Brushless
à cage tournante : 4 g par watt
- Turbine EDF : 2 g par watt
- Brushless 'inline' en direct :
2 g par watt
- Brushless 'inline' réducté
: 5 g par watt
Exemples: Un warbird avec une propulsion 'cage tournante' de 1.000 watts offre ± 4 kg de traction statique. Un jet avec une propulsion de 600 watts donne ± 1200 g de poussée au sol.
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Les turbines électriques ont un rendement médiocre à basse vitesse. N'espérez pas plus de 2 g de poussée par watt au décollage. |
Des chevaux très puissants...
La troisième formule magique est celle qui est restée sur les bancs de l'école...
- Watts = Volts x Ampères
- Volts = Watts / Ampères
- Ampères = Watts / Volts
Quel rapport avec les chevaux ? Facile, la puissance s'exprime en chevaux ou en watts.
En électrique, on utilise les watts,
mais on peut convertir facilement :
1.000 watts = 1,34 cv ou encore 1 cv = 750 watts
Exemple : un Trainer avec un accu de 12
volts et un courant de 40 A a une puissance de 480 watts. Notez que le
même avec un 6,5 cc développerait 1 cv, ce qui fait
750 watts pour des performances similaires... C'est que la propulsion
électrique est plus efficace et surtout offre plus de puissance
à bas régime. Un peu comme une voiture au diesel parait
plus puissante que la même à l'essence, même si elles
ont toutes les deux 95 chevaux.
Chaud devant !
E=Mc2 et la planète se réchauffe, c'est bien connu. Les moteurs aussi, hélas. Pour savoir jusqu'où vous ne pouvez pas dépasser une température exagérée il existe aussi une formule abracadabrante...
- Avion à hélice: poids du moteur x 3 = watts maximum.
- Avion à turbine: poids du moteur x 5 = watts maximum.
Exemple : un moteur à cage tournante
Cyclon 60 de 235 g peut "dissiper" sans danger 705 watts. Un
"inrunner" de 200 g monté sur une turbine pourra être
poussé à 1.000 watts.
Bien entendu, la magie n'opère que si le moteur est raisonnablement
ventilé et utilisé correctement. Si vous faites tourner
le moteur Cyclon 60 sur un accu de 10 volts à 70 ampères,
il ne tiendra pas bien longtemps. Mais à 20 volts et 35 A, pas
de soucis !
Notez que cette formule ne marche que pour les moteurs brushless. Les canettes préhistoriques à balais du genre Speed 600 encaissent à peine plus que leur poids en watts...
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420 watts donnent à ce Pilatus de 2,7 kg
un vol convainquant. |
Toute résistance est inutile...
L'or est un métal formidable
qui ne s'oppose presque pas au passage du courant. Malheureusement, il
est aussi très lourd, c'est entre autres pourquoi nous utilisons
des fils de cuivre dans nos petits avions. Malheureusement, le cuivre
transforme une partie de nos électrons en chaleur. Non seulement
ça contribue au réchauffement climatique, mais en plus on
perd des tours à l'hélice, ce qui est bien plus catastrophique
! Pour éviter ce phénomène dramatique, il faut choisir
un fil de section adaptée au courant qui passe dedans :
- Jusqu'à 25A : fil de 1,5mm²
- Jusqu'à 60A : fil de 2,5mm²
- Jusqu'à 100A : fil de 4mm²
Les connecteurs et les soudures doivent aussi présenter une section suffisante. Dans ce domaine comme dans d'autres, c'est mieux quand c'est plus gros...
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Les connecteurs doivent être adaptés au modèle. Les petits de 2 mm vont jusqu'à 20 A.
Ceux de droite (3,5 mm) jusqu'à 60 A et ceux en argent massif (Kontronik 4 mm) passent 100 A. |
Les volts tournent en rond
Vous vous demandez peut-être à quoi sert le fameux "kV"'
dont on affuble les moteurs électriques ? Cette abréviation
indique le nombre de tours par volt du moteur. Cette fois, la formule
magique nous donne une idée du régime de rotation "normal"
du moteur sur l'avion.
- Régime du moteur = KV x volts x 3/4
Exemples : un moteur à cage tournante
de 1.200 kV connecté à un accu de 10 volts tournera à
9.000 t/mn. Un moteur "inrunner" de 4200 kV avec un accu de
10 volts tournera lui à 31.500 t/mn.
Parfois rond, mais pas forcément plein...
Le voltage des accus n'est pas toujours de 1,2 volts pour les Ni-MH et 3,7 volts pour les Lipos. Ces valeurs dites "nominales" sont plus indicatives qu'autre chose. Par exemple, pour estimer combien de watts on peut tirer d'une propulsion, il faut tenir compte du voltage en fonctionnement. Mais pour savoir si un accu est plein, on mesure son voltage au repos. Les valeurs ci-dessous donnent une indication du voltage typique par élément.
- Lipo pendant le vol : 3,3 volts
- Lipos chargé au repos :
4,1 volts
- Lipo vide au repos : 3,7 volts
- Ni-MH pendant le vol : 1,1 volts
- Ni-MH chargé au repos :
1,4 volts
- Ni-MH vide au repos : 1,2 volts
Exemples : Si vous avez besoin de ±300 watts pour faire voler votre avion, il faudra un accu LiPo de 3 éléments ou un accu Ni-MH de 9 éléments alimentant le moteur sous 30A.
Pour faire simple, voici les valeurs en
vol "arrondies" des accus lipos les plus courants :
- 2S = 7 volts, 3S = 10 volts, 4S = 13 volts, 6S = 20 volts, 10S = 33 volts.
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Voltmètre et pince ampèremétrique "DC" sont des outils essentiels des modélistes branchés.
Le wattmètre remplit les deux fonctions en un seul boîtier et s'avère souvent moins coûteux. |
Pas de révolution sans pouces !
Le choix d'une hélice n'est pas évident. On prend généralement
celle qui a le bon diamètre pour que le moteur "prenne ses
tours" tout en gardant un courant raisonnable. Mais quel "pas"
choisir ? Rien ne remplace le test en vol, mais voici une formule pour
guider votre choix.
- Vitesse de vol en km/h = pas (en pouces) x régime moteur / 800
- Vitesse de vol en km/h = pas (en cm) x régime moteur / 2.000
Exemple : Vous essayez plusieurs hélices
sur un gros trainer. Une grande hélice 14"x4" tournant
à 8.000 t/m entraînera votre avion à 40 km/h,
ce qui est trop peu. Par contre, une 11"x8" à 11.000
t/mn donnera 110 km/h, ce qui est exagéré. Le bon compromis
sera probablement une 13"x6" à 9.600 t/mn qui vous donnera
72 km/h. Notez que cette formule est aussi magique pour les thermiques
vu qu'elle se base sur l'avancement de l'hélice à chaque
révolution, quel que soit le moteur.
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Les motoplaneurs classiques se contentent de seulement 100 watts par kilo pour voler. |
Qu'est-ce que "C" ? "C" facile...
L'étiquette d'un pack lipo indique "15-20 C"', mais il
est aussi marqué "1 C"... Le "1C" indiqué
en petit, c'est le courant de charge maximum, qui ne peut pas
dépasser 1 fois la capacité de l'accu. C'est comme ça
pour tous les LiPos. Par contre, le label "15-20 C" promet que
l'accu peut débiter 15 fois sa capacité en décharge
sans problèmes et même 20 fois sa capacité pendant
quelques secondes sans griller. La vérité est ailleurs et
il faut tempérer l'optimisme des fabricants. Dans la pratique,
oubliez le second nombre et gardez le premier comme valeur à ne
pas dépasser pendant quelques secondes. La valeur de décharge
"réaliste" se calcule comme suit :
- Décharge max. au sol = (Premier nombre) C x capacité de l'accu / 1250
- Décharge max. pendant une minute = (Premier nombre) C x capacité de l'accu / 1500
- Décharge max. continue = (Premier nombre) C x capacité de l'accu / 2000
Exemple : un accu 3.000 mAh "20/30C"
peut théoriquement subir 60A pendant deux ou trois secondes. Il
résistera à un décollage à 48 A. Une alternance
de passages lents et de circuits "plein pot" à 40 A ne
lui fera pas peur. Théoriquement, il pourrait faire tout le vol
à 30 A. Tout cela bien sûr, à condition que l'accu
soit raisonnablement bien ventilé...
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La formule magique des hélices s'applique
aussi aux thermiques. |
Ampère son temps en l'air
Pour savoir combien de temps on peut voler avec tel ou tel accu, suivez
cette formule magique :
- Course ou vol "à fond"
: Secondes = capacité (en mAh) x 4,2 / courant max au sol
- Voltige : Secondes = capacité (en mAh) x 7 / courant max au sol
- Vol normal : Secondes = capacité (en mAh) x 11 / courant max au sol
Exemples :
Course de FunJet avec un accu de 2.400 mAh et un moteur qui "tire"
42 A : 2400 x 4,2 / 42 = 240 secondes, ou 4 minutes de vol.
Programme F3A avec un accu de 4.100 mAh
et un courant max de 52 A : 4.100 x 7 / 52 = 552 secondes, ou 9 minutes
de vol.
Vol en Calmato avec un accu 3.000 mAh
et un brushless à 34 A : 3.000 x 11 / 34 = 970 secondes, ou 16 minutes
de vol.
Manque pas d'air !
Pour refroidir un moteur thermique, on fait une prise d'air dans le capot. En électrique, c'est pareil, sauf que l'accu et le contrôleur doivent aussi être refroidis. L'air devra donc ressortir derrière ces appendices... Mais quelles tailles doivent avoir les ouvertures ?
- Surface de l'entrée d'air = nombre de watts / 40
- Surface de la sortie d'air = nombre de watts / 30
Exemple : un warbird avec une propulsion optimisée de 1.000 watts aura besoin de 1.000 / 40 = 25 cm² d'entrée d'air et 33 cm² de sortie d'air. Celle-ci devra se trouver derrière l'accu.
Il est impératif que la sortie soit plus grande que l'entrée d'air. Sans quoi, il peut se former un phénomène de stagnation de l'air chaud.
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Difficile de ventiler les modèles en mousse.
Il faut alors surdimensionner les composants
pour éviter une surchauffe. |
Les Ohms ont trop Ri
Les accus modernes délivrent des performances extraordinaires grâce à une résistance interne ("Ri") très basse. Mais toutes les batteries ne se valent pas et certaines ont une "Ri" meilleure que d'autres. Pour comparer la qualité de deux accus de marques différentes ou savoir si un ancien pack est encore "au top", il faut mesurer la résistance interne. Pour cela, munissez-vous d'un voltmètre et d'un ampèremètre (ou d'un wattmètre qui combine les deux fonctions).
Mesurez le voltage "V1" pendant une décharge à un courant "A1" correspondant à ±1C
Mesurez
le voltage "V2" pendant une décharge à un courant
"A2" correspondant à ±10C
- Ri
= (V1 - V2) / (A2 - A1)
Exemple
: Pour un accu Lipo tout neuf de 3 éléments et 2.200 mAh,
vous mesurez 11,4 volts à 2,2 A de décharge et 10,5 volts
à 22 A de décharge. La résistance interne du pack
est de (11,4 - 10,5) / (22 - 2,2) = 0,045 Ω. Cela correspond à
une Ri par élément de 0,015 Ω.
A la fin de la saison, votre avion n'a plus la "pèche". Une nouvelle mesure de Ri vous donne 11,2 volts à 2,2 A et 9,5 volts à 22 A, soit 0,086 Ω, ce qui signifie que l'accu a perdu presque la moitié de ses qualités. La différence en vol est flagrante.
Attention
: Ri augmente quand la température baisse et quand l'accu se décharge.
Faites donc vos tests dans des conditions constantes. Le plus précis
est de mesurer quand l'accu est à moitié déchargé
et à température ambiante.
Volez
plus longtemps : ajoutez un élément !
Notre dernière formule magique permet d'estimer la quantité
d'énergie se trouvant dans un accu :
- E = capacité (en Ah) x voltage
Par exemple,
on peut voler plus longtemps avec un accu Lipo 3S de 1.000 mAh qu'avec
un 2S de 1.300 mAh... En effet, pour obtenir le même style
de vol, l'accu 2S de 7,4 volts devra délivrer 13,5 A de courant
pour atteindre 100 watts de puissance alors que le 3S donnera seulement
9 A. Avec la formule donnée plus haut, nous trouvons un temps de
vol "normal" dépassant 20 minutes pour l'accu 3S contre
moins de 18 minutes pour le 2S. En prime, le taux de décharge
"C" de l'accu 3S est plus bas et l'accu souffre donc moins.
La formule
nous l'aurait dit encore plus vite :
- Energie dans l'accu 2S: 1,3 x 7,4 = 9,62
- Energie dans l'accu 3S: 1 x 11,1 = 11,1
Les esprits contrariants diront qu'avec moins d'éléments on tourne une plus grande hélice avec un meilleur rendement. C'est vrai, mais la décharge plus soutenue et l'ampérage élevé sur le moteur causent des pertes qui annulent le gain escompté.
Surprenant, non ?
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Démonstration sur mon P-40 Svenson
de 170 cm d'envergure et 4 kg
Le
moteur consomme 51 A en pointe sur un accu lipo 6S.
La formule magique des lipos nous annonce ± 20 volts ce qui
permet de calculer la puissance obtenue :
20 V x 51 A = 1.020 watts
ou 1,36 cv.
Comme l'avion a plus de 250 watts par kilo, il est très largement
motorisé. Il monte à la verticale, comme le prédit
la formule : 4 g x 1020 = 4.080 g de traction. Mais
attention à la surchauffe du moteur à cage tournante
car il ne pèse que 320 g !
Théoriquement, il faudrait rester sous les 320 x 3 = 960
watts. Cela dit, sur cet avion l'entrée d'air de 26 cm²
et la sortie d'air chaud de plus de 34 cm² autorisent un refroidissement
optimal. |
On peut encore dire que les câbles d'alimentation ont une section de 2,5 mm².
Comme le moteur a un KV de 500, il tourne à 20 x 500 x 3/4 = ± 7500 tours. L'hélice est une 15"x8", ce qui nous donne une vitesse max. de 8 x 7.500 / 800 = 75 km/h, parfait pour ce modèle.
L'accu a une capacité de 4.400 mAh, donc l'autonomie sera de 4.400 mAh x 11 / 51A = 949 secondes ou près de 16 minutes pour un vol normal.
L'accu
vendu pour "20/30C" n'est pas trop sollicité car
il peut délivrer un maximum de 20 x 4.400 / 1.250 = 70,4
A en pointe et 20 x 4.400 / 1.500 = 58 A pendant une minute.
Il ne faut cependant pas voler à plein régime tout
le temps car on dépasserait le courant admissible en continu
: 20 x 4.400 / 2.000 = 44A...
Alors... CQFD ? |
Contacter l'auteur : laurent.schmitz@jivaro-models.org |
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